A la veille de la probable réintégration de l’élu UDC, jugée inapplicable sur le plan humain par la majorité du Conseil général, cet article a pour but de revenir à l’exposé de certains faits. En dehors de l’audit qui nous reste inconnu, nombre d’autres éléments nous convainquent que JCL n’a pas pas la légitimité morale pour continuer son travail d’élu. Notre responsabilité sera de tolérer sa légitimité juridique sous des conditions draconiennes qui garantiront la protection des employés, le respect de la collégialité au sein de l’exécutif ainsi que la crédibilité et la sérénité de notre cité.
Reprenons donc certains faits ici illustrés par des documents accessibles à tous :
1) L’affaire Legrix commence publiquement le lundi 25 mars lors de la séance de la sous-commission financière où lui est posée une question sur « l’état d’esprit » dans son dicastère. Sa réponse est « qu’aucun problème RH [au niveau des ressources humaines] particulier et important n’est à signaler« . Pourtant la nécessité d’un audit dans son dicastère va se poser peu après.
2) Le 6 juin, L’Impartial explique qu’un audit est entrepris dans le dicastère pour, selon JCL, identifier et diagnostiquer « les problèmes et proposer au Conseil communal des solutions satisfaisantes ». Dans le même article, la journaliste Silvia Freda a recueilli un témoignage sur JCL, venant d’une de ses anciennes collaboratrices. L’élu a aujourd’hui porté plainte contre l’auditrice mais pas contre cette personne ni contre Silvia Freda.
3) Le 16 août, dans un communiqué, le Conseil communal explique que l’audit « met en lumière – à partir de 47 entretiens individuels – différents faits ou comportements problématiques au sein du dicastère, qualifiés pour certains d’illicites par la mandataire. Or le comportement de M. Legrix s’est révélé être au centre de la majorité des dysfonctionnements constatés, avec notamment des atteintes répétées à la personnalité ou des actes s’apparentant à du harcèlement. Ceci a généré une ambiance de peur et de grande souffrance chez de nombreux collaborateurs du dicastère. » JCL va porter plainte par la suite contre l’auditrice et « X » pour injures, calomnie et diffamation.
4) Après la mise à l’écart de JCL le 16 août, Olivier Kurth, de la Télévision romande, fait le 23 août un papier en recueillant lui aussi des témoignages d’anciens collaborateurs et en se distançant des certificats de travail élogieux que l’élu brandit pour sa défense. Il n’a aujourd’hui pas porté plainte contre Olivier Kurth.
5) Le 23 août, Claude Grimm du Courrier, contre laquelle JCL n’a aujourd’hui pas porté plainte, lui consacre un long article qui voit d’abord son collègue de parti Pierre Hainard, ancien conseiller communal, déplorer la manière dont JCL dirige son dicastère :
L’article insiste aussi sur les débordements inconvenants de l’élu UDC lors de soirées officielles :
6) Le 25 août, Fabiano Citroni, du Matin Dimanche, journaliste couronné en août 2013 par le prix du journalisme local romand, publie une longue enquête sur JCL après avoir recueilli différents témoignages. Non seulement JCL n’a aujourd’hui pas porté plainte contre M. Citroni mais lui a accordé un long entretien d’aveux le 1er décembre. Ces témoignages portent notamment :
a) Sur le pinaillage de JCL et ses hurlements :
b) Sur ses anciens emplois et son attitude dans le secteur privé :
c) Sur son sexisme :
7) Le 25 août la Télévision romande, qui n’est pas aujourd’hui l’objet de plainte de la part de JCL, propose dans Mise au point un long sujet de 15 minutes avec en particulier deux témoignages :
a) Le premier décrit les méthodes de délation et d’espionnage mises en place au sein de la voirie communale :
b) Le second provient d’une employée placée sous les ordres de JCL dans un ancien emploi :
8) Le 29 août, Alex Baur consacre un long article de la Weltwoche, sur le « putsch » politique dont aurait été victime JCL. On y lit notamment des informations sur des événements dont seul l’élu était au courant, preuve ici du non respect du secret de fonction.
9) Depuis le mercredi 27 novembre, à mots couverts, l’élu UDC a admis la « brutalité » dont lui parle Darius Rochebin en direct du 1930 le 29 novembre. Rochebin lui demande s’il « reconnaît des maladresses ». L’élu « reconnaî[t] » sa très grande « exigence« , son « impatience » parfois et son « perfectionnisme« . Puis il dit : « Effectivement, je suis quelqu’un de très direct et en général les gens savent à quoi s’en tenir lorsque je leur dis quelque chose« . Dans ce mot, « effectivement », JCL reconnaît, certes avec déni, ses fautes de comportement.
10) Les aveux se précisent dans le Matin dimanche du 1er décembre. Le même journaliste que le 25 août, Fabiano Citroni, interroge JCL. L’élu déclare s’être « déjà excusé devant les personnes que j’ai pu blesser » et est « prêt à prendre un coach ». Il se dit capable de « mettre de l’eau dans son vin », affirme s’être remis en question et avoir compris « qu’il y avait un monde entre le secteur privé et le secteur privé ». Il reconnaît avoir « peut-être voulu aller trop vite ».
L’article se termine par une phrase anthologique sur les collaborateurs masculins qui ont pleuré durant leur audition par Mme Pache :
Je reste donc en ce début janvier convaincu que JCL a eu des comportements illicites dans son absence de respect des personnes sous ses ordres. C’est indigne d’un membre d’un exécutif qui, s’il reconnaît son perfectionnisme, son exigence et son impatience, peine encore à admettre que leurs effets sur ses subordonnés ont un nom dans le monde du travail : le harcèlement, la « maltraitance managériale », comme le dit le Conseil communal. C’est une perverse mise sous emprise d’autrui dont la brutalité est niée par une personnalité très narcissique.
Mais, comme l’analyse le philosophe Max Weber dans Le Savant et le politique, il y a un abîme entre la conviction et la responsabilité, ce qu’a hélas mal compris le Conseil communal, qui a démis JCL de son dicastère par conviction sans mesurer les effets politiques de cette décision juridiquement attaquable. Weber écrit :
» Nous en arrivons ainsi au problème décisif. Il est indispensable que nous nous rendions clairement compte du fait suivant : toute activité orientée selon l’éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées. Elle peut s’orienter selon l’éthique de la responsabilité [verantwortungsethisch] ou selon l’éthique de la conviction [gesinnungsethisch]. Cela ne veut pas dire que l’éthique de conviction est identique à l’absence de responsabilité et l’éthique de responsabilité à l’absence de conviction. Il n’en est évidemment pas question. Toutefois il y a une opposition abyssale entre l’attitude de celui qui agit selon les maximes de l’éthique de conviction – dans un langage religieux nous dirions : « Le chrétien fait son devoir et en ce qui concerne le résultat de l’action il s’en remet à Dieu » -, et l’attitude de celui qui agit selon l’éthique de responsabilité qui dit : « Nous devons répondre des conséquences prévisibles de nos actes. » (…) Lorsque les conséquences d’un acte fait par pure conviction sont fâcheuses, le partisan de cette éthique n’attribuera pas la responsabilité à l’agent, mais au monde, à la sottise des hommes ou encore à la volonté de Dieu qui a créé les hommes ainsi. Au contraire le partisan de l’éthique de responsabilité comptera justement avec les défaillances communes de l’homme (…) et il estimera ne pas pouvoir se décharger sur les autres des conséquences de sa propre action pour autant qu’il aura pu les prévoir. Il dira donc : « Ces conséquences sont imputables à ma propre action. » Le partisan de l’éthique de conviction ne se sentira « responsable » que de la nécessité de veiller sur la flamme de la pure doctrine afin qu’elle ne s’éteigne pas, par exemple sur la flamme qui anime la protestation contre l’injustice sociale. Ses actes qui ne peuvent et ne doivent avoir qu’une valeur exemplaire mais qui, considérés du point de vue du but éventuel, sont totalement irrationnels, ne peuvent avoir que cette seule fin : ranimer perpétuellement la flamme de sa conviction.
Mais cette analyse n’épuise pas encore le sujet. Il n’existe aucune éthique au monde qui puisse négliger ceci : pour atteindre des fins « bonnes », nous sommes la plupart du temps obligés de compter avec, d’une part des moyens moralement malhonnêtes ou pour le moins dangereux, et d’autre part la possibilité ou encore l’éventualité de conséquences fâcheuses. Aucune éthique au monde ne peut nous dire non plus à quel moment et dans quelle mesure une fin moralement bonne justifie les moyens et les conséquences moralement dangereuses. »
Pour notre part, convaincu des maltraitances générées par JCL, nous prendrons nos responsabilités d’élu sitôt qu’il retrouvera ses fonctions. Je l’ai écrit dans ce blog, nous sommes dans un état de résistance et la confiance rompue ne pourra vraisemblablement pas se réinstaller jusqu’à la fin de la législature. Il est impossible de transiger sur des conditions draconiennes garantissant le respect des personnes : employés, collègues du Conseil communal, conseillers généraux et citoyens.
A cet effet, pour les employés, une cellule anti-harcèlement, indépendante du service des Ressources humaines, devrait être mise en place afin de pouvoir réagir immédiatement dans le cas de nouveaux dérapages comportementaux du Conseiller communal. L’éventualité d’un « coaching » est à envisager comme il le suggère d’ailleurs.
D’autre part, le travail du Conseil communal sera réduit à néant si JCL persiste à violer le secret de fonction en s’épanchant constamment dans les médias par entretiens téléphonique ou télévisé. Le respect strict de la collégialité doit être une règle intangible sur laquelle on ne peut pas non plus transiger.
Le Conseil général, notamment par les membres de sa commission financière, sera le garant du respect de ces conditions par JCL : terminé les boniments et les manipulations devant le parlement comme ce fut encore le cas le 10 décembre dans la séance la plus noire de l’histoire du Conseil général. On l’a vu écharper en public ses propres collègues de l’exécutif : la cité mérite mieux qu’un état de guerre ouverte permanent.
L’hypothèse d’une enquête parlementaire est dès aujourd’hui ouverte. Selon l’article 129 du Règlement communal, une « commission interne du Conseil général » peut se charger de « l’étude d’un objet particulier « . En l’occurrence faire encore plus de lumière sur « les faits ou comportements problématiques au sein du dicastère » des Infrastructures et énergies depuis août 2010. En tant qu’élu jusqu’en mai 2o16, il faut maintenant prendre la main dans cette affaire après cinq moins d’un presque total silence. Le temps joue pour nous !