« La Nature : et nous ? » au Stapferhaus de Lenzburg


La Nature : et nous ? est une exposition interdisciplinaire et interactive sur l’état de la planète et la manière dont nous nous situons face à cette réalité angoissante. Contrairement à la présentation du Muzoo à La Chaux-de-Fonds, elle laisse la réflexion ouverte plutôt que de nous faire suivre un couloir dépressif. À voir de toute urgence jusqu’à fin octobre 2023 : tout est aussi en français !

L’immense structure modulaire du Stapferhaus permet un parcours libre et un questionnement invitant à de multiples positions possibles : toute science est certes idéologique mais certains scientifiques sont plus idéologues que d’autres !

Au départ, on reçoit un badge qu’on plaque contre un grand nombre de bornes au fur et à mesure des passages dans des stations-alvéoles, pas celles d’un chemin de croix imposé mais librement choisis par l’arpenteur-visiteur. On peut d’ailleurs parcourir l’exposition pieds nus, conseil appréciable en été mais déconseillé aux frileux en hiver.

Trois secteurs structurent le parcours : deux petits entourés d’un grand.

D’abord, on s’immerge dans une salle d’animaux empaillés, d’insectes et de minéraux exposés à l’ancienne selon la muséographie du 20e siècle.

L’espace central s’organise autour d’un tube circulaire présentant, à travers, des statistiques, des chiffres, des graphiques et des images terrifiantes (ici la mer de plastique d’Almeria) l’état actuel de la dévastation sauvage : « l’état critique de la Terre ».

On a le choix, dans cette nef polyvalente, de s’asseoir pour voir sur de grands écrans, avec écouteurs sonores, plusieurs films laissant s’exprimer des spécialistes et chercheurs : un hydrogéologue, un botaniste, et même une chamane, etc. Ou de pénétrer dans de multiples alvéoles conçues par des scientifiques de multiples domaines.

Retenons quelques-unes de ces alvéoles :

– L’écosystème microbien où on met l’œil dans une mini-cabine de grossissement des systèmes microbiens présents dans les corps humains.

– Le droit d’un fleuve colombien à une personnalité juridique, à travers des témoignages enregistrés sur place par un ethnologue.

– Les relations des hommes aux chiens, notamment avec un émouvant entretien avec une éducatrice de chiens de sauvetage sous les décombres.

– La communication des humains avec les plantes, synthèse d’une recherche menée à l’ETH de Zürich.

– Une alvéole d’un mètre de haut qui nous oblige à ramper comme un renard reluquant les déchets et les poubelles d’une grande ville.

La visite complète de la nef prend bien deux heures avant qu’on ressorte dans le dernier secteur. Sur un grand écran rectangulaire, quatre acteurs et actrices jouent quatre types de citoyens : le holistique, le geek, l’informé et l’insouciant, prototype de l’électeur d’extrême-droite négationniste, sans conscience que son monde est en train de se fracasser.

Les quatre personnes dialoguent et on est régulièrement amené à voter oui ou non sur un certain nombre de questions qu’ils posent. Prélude a la fin de l’exposition où on dépose le badge qu’on a régulièrement posé sur les quatre réponses possibles aux questions posées dans le parcours.

Et voilà que sort la géographie mentale du visiteur sous la forme d’une petite feuille imprimée

L’alliance des contributions scientifiques pluridisciplinaires à la liberté – du parcours, de choix des réactions – du visiteur offre une expérience muséographique et sensorielle unique en Europe : c’est la chance de Lenzburg d’abriter un pareil lieu d’un nouveau genre.

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