Quoi de plus inexportables qu’une sfogliatella et un café napolitains, alliance de la douceur et de la force, symboles même d’une ville résistant toujours à l’adversité par le sourire ?
Un café napolitain brûle d’abord par sa tasse que les vrais petits bars populaires tiennent chaude dans un bac d’eau frémissante au-dessus de la machine. Le serveur la prend avec une pincette et la remplit de ce qui est une liqueur amère extrêmement torréfiée recouverte d’une mousse onctueuse. Force affirmative d’un désir énergétique qui résiste aux adversités diverses : occupations étrangères, crises, catastrophes, chômage et chantages.
La sfogliatella riccia est son complément inverse : la douceur de vivre d’un peuple amateur de sucreries. Naples la baroque ne va pas sans stuc et sucre, panaches crèmés et angelots joufflus. Cette pâtisserie en forme de cône découpé en lamelles est préparée avec de la pâte feuilletée très craquante et est fourrée de ricotta parfumée à la vanille ou à la cannelle avec des fruits confits. Elle se déguste rigoureusement chaude, à peine sortie du four. Elle craque d’abord sous la dent pour laisser la bouche torréfiée se remplir de la « morbidezza » de la farce souvent relevée par de la fleur d’oranger. La poudre sucrée vous blanchit les doigts rendus légèrement gras par la pâte feuilletée. La meilleure se mange en face de la gare centrale, à l’Antico Forno delle sfogliatelle Calde dei Fratelli Attanasio et si vous avez la chance d’être servie par la jeune femme noiraude aux yeux clairs, vous serez d’autant plus immergés dans cette douce force napolitaine inexportable.