Avec 3 ministres sur 5 au gouvernement et 32 député-e-s sur 100, le PLR neuchâtelois ne remporte qu’une victoire en trompe-l’œil. Nous aurons un parlement et un gouvernement uniques en Suisse : nous sommes tournés vers l’avenir avec les femmes et vers le passé avec 2 partis dominateurs gouvernant seuls. Il est temps de réfléchir à l’élection à la proportionnelle de notre gouvernement.
Il n’y ni de vague bleue pour le PLR ni de plébiscite pour Crystel Graf. Le parti de centre-droit, qui est à féliciter, n’a pour autant pas de motifs à pavoiser pour plusieurs raisons.
- Au parlement il ne pourra pas décider tout seul
Comme je l’ai déclaré au Courrier le 23 avril, les élections au Grand Conseil « en finissent avec l’hégémonie historique du PLR et du PS. La particularité de Neuchâtel aujourd’hui est qu’il faut désormais parler d’un centre pluriel, grandement renforcé ». Les partis centristes (Vert’libéraux et Centre) sont avec leurs 12 sièges désormais dans une situation expérimentale. Davantage présents dans les commissions, ils joueront un rôle décisif de pivot.
Tout projet d’importance marqué à droite (exemple : ouverture des magasins plusieurs dimanches par an dès la fin des vacances) ne réussira pas à passer avec les 40 sièges UDC-PLR, sous peine de référendum. De même le PS et le PLR ne parviendront plus à réunir à eux deux (ils ont 53 sièges) les trois cinquièmes du parlement, des majorités qualifiées, pour faire passer des projets d’envergure.
De plus, avec 58 femmes, record de Suisse, et 58 député-e-s des Montagnes et du Val-de-Travers (score cantonal à battre en 2025 !), l’influence des notables masculins libéraux du Littoral, laminés par l’élection du 25 avril, sera moindre.
- Au gouvernement il est le seul parti de Suisse détenant la majorité de sièges.
En Valais, la majorité PDC a rendu l’âme cette année. Notre canton est tourné vers le passé avec une majorité de sièges gouvernementaux détenus par un seul parti.
Si le PS et le PLR arrivent dans les prochaines années à regarder en face leurs majorités successives 3-2 depuis 1965 (sauf exceptions avec Michel von Wyss, Fernand Cuche et Yvan Perrin), ils conviendront qu’un débat devrait être lancé sur la possibilité d’élire notre gouvernement à la proportionnelle comme au Tessin.
C’est le sens de mon article du 21 avril. Pourquoi les Verts, le Vert’libéraux, le Centre, le POP et l’UDC (et même le PS qui défend le système proportionnel dans les villes) ne lanceraient-ils pas une initiative cantonale afin de changer de système dès 2025 ou 2029 ?
- Sa victoire est aussi due aux erreurs stratégiques des Verts
Sans contester la légitimité des bons résultats du PLR, force est de regretter la stratégie mise en place par les Verts depuis octobre 2019.
- Ils n’ont présenté qu’un candidat, désigné comme potentiel ministre depuis trop longtemps, sans faire équipe avec une femme sur leur liste au premier tour ;
- Ils ont fait campagne avec un mari candidat/ministre et son épouse présidente de parti malgré les immenses qualités de ces deux personnes ;
- Ils n’ont pas su retenir leurs électrons libres intégristes de l’anti-bétonnage au point de voir ceux-ci torpiller la fin de la campagne avec le lancement du référendum contre la H18 avant ce dimanche 9 mai.
La vague verte ayant déferlé en octobre 2019 et 2020 est maintenant terminée. Le parti de Céline Vara, Fabien Fivaz, Patrick Herrmann et Nicole Baur aura un bilan à défendre dès octobre 2023 pour la prochaine ronde électorale.