Les objets chorégraphiques de Forsythe et Ikeda


Dans deux salles distinctes de la grande halle de la Villette à Paris, les installations de William Forsythe et Ryoji Ikeda sont un événement culturel, plastique et sensoriel qui fera date. Ce sont ce qu’appelle Forsythe des « objets chorégraphiques ».


Ce sont des objets, numériques, construits à l’aide de systèmes mathématiques et installés dans l’espace des deux salles grâce à des dispositifs techniques sophistiqués.

Forsythe, le grand chorégraphe américain longtemps établi à Francfort, fait osciller dans la salle des centaines de fils blancs lestés des pendules. Le dispositif se meut à intervalle réguliers sur des rails et oblige le spectateur à devenir chorégraphe dans cette œuvre intitulée Nowhere and Everywhere at the same time.

Ikeda, figure phare des musiques électroniques, déploie au sol des projections noires et blanches figurant des codes barres. Le visiteur se déchausse pour entrer dans cet espace hypnotique, test pattern, l’affectant dans son corps comme dans l’autre œuvre mais de manière différente.

Dans Nowhere and Everywhere at the same time, notre corps doit lire en permanence chaque signe de son environnement et ce n’est pas facile pour des malhabiles comme moi qui heurtons trop souvent les pendules, à moins d’une concentration visible dans ma vidéo. De regardants, nous devenons disponibles à l’ouverture à l’autre de cette installation rigoureusement conçue pour nous faire éprouver notre liberté et notre responsabilité d’interprètes.

Immersive plus qu’interprétative, l’expérience sensorielle proposée par Ikeda est le ying de l’autre yang. Confrontés chaque jour à un flux de données sonores et visuelles, nous nous y plongeons à notre guise, sans l’obstacle des pendules oscillants. Cependant notre corps est aussi affecté, avec une violence – l’entrée est déconseillée aux épileptiques – dont on s’accommodera : libre à nous de passer vite ou de nous coucher, de nous boucher les oreilles ou la vue, d’être seuls ou avec un autre qui nous filme.

Deux installations sérielles et sensorielles inoubliables, à vivre jusqu’au 31 décembre dans les anciens abattoirs devenus terrains réjouissants de nos pulsions corporelles. Des objets plastiques pour nous faire vivre et mouvoir notre corps.

 

 

 

 

 

 

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