Notre ami Carlo Baratelli n’est plus mais son esprit et son oeuvre demeurent à jamais en nous. Le maître empreint de rigueur laissait aller son tempérament dans ses admirations intellectuelles et ses oeuvres marquées par la croisée des genres.
Rien de plus parlant pour ce bref hommage, si nécessaire en ces jours de séparation, que la peinture que j’ai chez moi depuis si longtemps. Sans titre, c’est un totem qui s’érige sur un halo noir étalé sur la toile à la trame largement apparente.
C’est une peinture qui montre une sorte de sculpture dans une rigueur de plan d’architecte. Dans l’espace du totem blanc, le geste libre de l’artiste (la danse tant aimée par sa femme Christiane !) se laisse aller dans une improvisation de signes, comme des paroles multiples qui s’inscriraient dans la matière picturale.
Tout Carlo est là, volubile dans les discussions sur ses artistes admirés, tant des peintres que des cinéastes ou des poètes. Et aussi rigoureux jusqu’à la racine, comme cette toile largement brute.
A la Guilde du Film, et au ciné-club du Gymnase, il avait des goûts exigeants, du cinéma muet russe à Godard, en passant par les séries noires américaines. Quant nous l’avions croisé par hasard dans un bus new-yorkais en octobre 1984, il revenait enthousiasmé par les peintres abstraits américains du Moma. A Paris, il logeait rue Jules-Chaplain, près du carrefour Raspail-Montparnasse, ne manquant aucune grande exposition d’alors. J’y avais accompagné Christiane et Carlo il y a une quinzaine d’années pour voir la compagnie Merce Cunningham au théâtre de la Ville.
Figure totémique, phare dans nos références, merci Carlo !