La grande exposition de la collection Chtchoukine à la Fondation Vuitton a présenté dans ce nouveau musée-souk de grands chefs-d’œuvres acquis par ce collectionneur russe du début du XXe siècle. Dont la Desserte rouge de Matisse, immense dans ses dimensions et sa radicalité.
La Russie fut, à la fin du XIXe siècle jusqu’en 1917, ouverte au monde et à une certaine vie bourgeoise de l’esprit. Pendant que Tchékhov écrit la Cerisaie, le grand commerçant Chtchoukine acquiert à Paris, comme un possédé, les meilleures œuvres possibles de Gauguin, Cézanne, Picasso et surtout Matisse. Sa collection devient bien de l’Etat après la révolution, elle est maintenant dispersée au Musée Pouchkine de Moscou et à l’Ermitage de Saint-Pétersbourg.
Deux musées d’un pays dictatorial depuis 100 ans où je n’irai jamais, même si l’esprit soviétique tient salon, aussi chez nous en 2017. D’où l’apparente chance de voir une partie de cette collection dans le nouveau musée parisien de la fondation Vuitton construit par Frank Gehry, l’architecte mégalomane du Guggenheim à Bilbao.
Cette fondation est un calvaire pour l’amateur d’art : queue sous la pluie avant de passer le contrôle de sécurité, vestiaire avec 20 minutes d’attente, salles-souk où s’agglutinent à la queue leu-leu des moutons sur 5 étages qui ne permettent pas de continuité visuelle. On ne contemple rien, on regarde les chefs-d’œuvres quelques secondes, voire quelques minutes pour la Dame en bleu de Cézanne ou la Sainte-Victoire de 1904, paquebot voguant sur la mer agitée de la terre provençale.
On connaît bien sûr la Desserte rouge, desserte d’abord peinte en bleu et que Matisse uniformise dans une geste tranchant dont il a conscience, en 1908.
Le tableau qu’on découvre est bien plus immense qu’on l’imagine dans un livre d’art, deux mètres vingt de longueur. Sa radicalité donne, à sa manière, les clés de l’art moderne : une surface plate unifiant l’horizontal et le vertical, une fenêtre ouverte sur d’autres éléments à peindre (et non sur « le monde »), des objets et des êtres devenus des signes plastiques, l’espace de l’œuvre comme jeu décoratif et poétique : arabesques des motifs, symétrie des carafes et des chais, ponctuation végétale des citrons et des fleurs.
En l’honneur d’une des œuvres que j’aime le plus dans les images que je regarde d’elle, il valait peut-être la peine, une dernière fois peut-être, d’accepter tant d’avanies et de concessions. Pour de l’harmonie, émotionnelle et spirituelle.
Cher Daniel, Eh bien ta déception et tes ennuis au Musée Vuitton m’ont fait aimer ma situation d’infirme! Dès l’entrée, j’ai pu bénéficier d’une chaise roulante et j’ai pu admirer surtout les Gauguin tout à mon aise! Quant à la construction du Musée lui-même pour ce que ma condition physique m’a permis de voir, elle m’a enchantée. La situation dans le parc et la lumière, j’ai tout aimé….peut-être Est-ce la reconnaissance d’avoir des amis qui m’ont encore une fois permis d’aller à Paris qui contribue à mon bonheur? Amitiés. Maryse-Annette