Les trois mauvais coups de Laurent Kurth


Après sa décision « mûrement réfléchie » de démissionner avant le terme de son mandat, le ministre neuchâtelois Laurent Kurth, loin d’avoir fomenté un coup d’État, a cependant porté trois mauvais coups à l’intérêt général, à la République et à son parti cantonal.

L’intérêt particulier contre l’intérêt général

Depuis 2000, toute la vie politique du conseiller général, puis du conseiller communal et du conseiller d’État été placée sous le sceau de la primauté de l’intérêt général contre les intérêts particuliers. Laurent Kurth a toujours été très dur contre les corporatismes syndicaux, les fans-clubs des musées chaux-de-fonniers qu’il avait voulu mettre au pas en nommant une directrice générale en 2008. Il peinait à supporter les revendications sectorielles des employés des travaux publics chaux-de-fonniers en 2007, il s’est opposé avec Pauline de Vos Bolay au provincialisme des Montagnes pour garder leur hôpital. Et récemment il a lutté contre l’initiative « géo/topo » qui vise à redistribuer aux communes d’altitude, dont La Chaux-de-Fonds, l’argent versé au canton par la Confédération. Dans ce sens, il est un homme d’État certes clivant mais droit dans ses bottes et respectable dans sa ligne de conduite souvent rigide.

Et voilà que sa fin de carrière politique est ternie par le virage de petites manoeuvres particulières. Il prétexte la nécessité d’un renouvellement du gouvernement avant la fin de son mandat pour couper l’herbe sous le pied de personnalités politiques qui ne lui conviennent pas : trop régionalistes, trop à gauche, trop extrémistes. Théo-Huguenin-Élie, Martine Docourt, ses camarades socialistes ainsi que Fabien Fivaz et Céline Vara, les VertEs, sont candidatEs au parlement fédéral et ne seront pas les quatre éluEs mais auraient pu être en 2025 intéresséEs par une candidature au gouvernement.

Une république princière

Dans une monarchie ou des pays tenus de main de fer par des dictateurs, on choisit son départ en adoubant son dauphin. Le mauvais coup de Laurent Kurth à nos principes républicains est d’avoir anticipé son départ pour dérouler le tapis rouge à Frédéric Mairy, qui n’attendait que ce geste sûrement décidé de longue date. Le prince-camarade au prénom ducal tendant le sceptre du pouvoir à son camarade au prénom prussien :  » Je ne veux pas interférer dans le processus de désignation de mon successeur. Mais vous ne me verrez pas faire la grimace si cela devait être lui. » (ArcInfo, 2 septembre 2023). Avec le sens de la litote antiphrastique en plus ! Fabien Fivaz, conseiller national vert, a d’ailleurs relevé ce mauvais coup porté à notre république démocratique.

Un parti socialiste cantonal affaibli

Le samedi 9 septembre 2023, le parti socialiste neuchâtelois, malgré une tentative de son groupe parlementaire de reporter l’élection à plus tard, a entériné à l’unanimité la candidature unique de Frédéric Mairy. La démission de Laurent Kurth est d’abord un mauvais coup pour son probable successeur qui n’aura qu’une légitimité faible. Mais surtout elle a mis, met et va mettre en mouvement nombre d’électrices et d’électeurs pour l’élection au Conseil des États. L’objectif du PS de reprendre le siège des VertEs est probablement tué dans l’oeuf par ces manoeuvres d’officine. Ne mettons donc pas tous les oeufs dans le même panier, se disent ces électrices et électeurs, prêtEs à garantir une pluralité à gauche dans les mandats politiques cantonaux !

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