Pour Noël, le photographe et journaliste Alain Prêtre nous gratifie de son dernier livre d’images de paysages et d’animaux, Jura, les dompteurs du froid. À travers ces entités prodigieuses qu’il passe sa vie à mieux voir, l’auteur « pisteur » nous livre une approche philosophique « inséparée du vivant ».
Ce livre étonnant paru aux Éditions Omniscience dans les Alpes-Maritimes nous immerge « dans le froid et la neige pour raconter le quotidien de mammifères et d’oiseaux confrontés à des conditions climatiques extrêmes ». Plus de 200 pages et 300 photos, toutes plus extraordinaires les unes que les autres.
Bouquetins, chamois, chevreuils, renards, marmotte mais aussi lynx, hiboux, chouettes et grands tétras, la faune jurassienne s’offre à nous d’un hiver à un autre, en traversant la fonte des neige, le printemps, l’été et l’automne.
Dans ce travail de pisteur inlassable, on se remet en mémoire les écrits récents du philosophe Baptiste Morizot, qui fut l’hôte du lycée Blaise-Cendrars et du Club 44 en octobre 2021.
Dans Manières d’être vivant, il veut mener une bataille culturelle pour restituer de l’importance au vivant. « Peut-on apprendre à se sentir vivants, à s’aimer comme vivants ? »
« Combien de fois n’avons rien vu de ce qui se tramait de vivant dans un lieu ? Probablement chaque jour. C’est notre héritage culturel, notre socialisation qui nous a fait ainsi, il y a des raisons et des causes à cela. Mais ce n’est pas une raison de ne pas se battre. Pas de reproches, mais une certaine tristesse à l’égard de cette cécité, de sa portée, et de sa violence innocente. C’est un enjeu majeur que de réapprendre, comme société, à voir que le monde est peuplé d’entités autrement prodigieuses que ne le sont les collections de voitures et les galeries des musées. Et de reconnaître qu’elles exigent une transformation de nos manières de vivre et d’habiter en commun.»
Morizot qui raconte combien de nuits et de journées il a pisté des loups dans le Vercors écrit : « Le pistage enrichi est le versant sensible et pratique d’une approche philosophique inséparée du vivant, c’est un style d’attention. Une manière d’être sur le qui-vive : un qui-vive disponible à la prodigalité des signes du vivant. »
Alain, c’est cela : toujours être sur le qui-vive, un amoureux du Jura certes mais aussi un pourfendeur des chasseurs, un défenseur de la présence du loup dans nos montagnes.
Il le dit dans un style fleuri et sans concession en accompagnant ses images de légendes ou commentaires qui se lisent comme des récits de vie.

La poésie n’est pas loin quand les arbres deviennent des HLM pour pinsons sauvages et le grand tétra une relique glaciaire.

Merci cher Alain et vive le prochain livre !